Notre communication s'intéresse aux difficultés que peuvent rencontrer les allophones à identifier un récit en interaction. Le récit est un procédé fréquent mais dont les caractéristiques peuvent varier d'une langue à l'autre. Nous proposerons une variété de récits attestés dans différentes situations. Nous aborderons sa réalisation en français, en espagnol et en italien du point de vue de son déroulement et des marqueurs employés lors de ses différentes étapes (introduction, co-construction et clôture). Nous cherchons à proposer aux apprenants les différentes structures que peut prendre un récit sachant qu'il garde une plasticité importante en interaction suivant les interlocuteurs qui vont le réceptionner, le compléter, l'évaluer pour le mobiliser ensuite ou au contraire en faire un tout autre objet. La souplesse de son organisation, souvent liée à sa co-construction par les participants (Goodwin 1986, Gülich & Quatshoff 1986), sera abordée en contexte, en tenant compte du type de situation, du nombre et de la proximité des locuteurs. Nous analyserons également la fonction pragmatique du récit. Elle peut aller de la simple illustration des propos d'un locuteur à l'introduction d'une narration à valeur argumentative ou encore d'une anecdote pour introduire un sujet à une histoire drôle entrainant une réaction des autres participants.
Si on assimile le plus souvent le récit aux situations privées, on oublie qu'il est également mobilisé dans des interactions professionnelles comme la consultation médicale, les échanges en commerce ou même en réunion de travail. L'exemple suivant montre le récit en réunion professionnelle entre publicitaires de JEB (violet), qui est évalué et co-construit par ces deux collègues (orange) tout au long de son déroulement avant d'être mobilisé par FAB pour son argumentaire. (marqueurs en gras) :

Exemple 1 : Récit en réunion professionnelle
Dans l'exemple 2, au cours d'une consultation médicale chez son kinésithérapeute une étudiante fait le récit de sa consultation précédente (marqueurs de début et de fin du récit en gras).

Exemple 2 : Récit en consultation médicale
Alors que le modèle de Labov a été remis en cause pour l'oral en interaction (Couper-Kuhlen & Selting 2018), différents formats émergent des données recueillies in situ qu'il s'agisse d'un récit long sur plusieurs tours de parole ou court.
On relève l'usage important de marqueurs aussi bien pour structurer le récit que pour l'évaluer. Nous proposons d'étudier ces marqueurs dans trois langues romanes (français, espagnol, italien) et de comparer leurs usages réels dans nos corpus d'interactions à la manière dont ils sont généralement présentés aux apprenants.
Bibliographie
Couper-Kuhlen, E. & Selting, M. (2018). Interactional Linguistics: Studying Language in Social Interaction. Cambridge University Press.
Goodwin, C. (1986). Audience Diversity, Participation and Interpretation. Text, 6/3, 283-316. https://doi.org/10.1515/text.1.1986.6.3.283
Gülich, E. & Quasthoff, U. M. (1986). Story-telling in conversation: Cognitive and interactive aspects. Poetics, 5(1–2), 217–241.