Nous proposons une communication avec un double regard. Le premier est celui d'une doctorante en science politique qui interroge comment la santé mentale des personnes migrantes victimes de psychotraumatisme a émergé comme problème public ces dernières années. Le second est celui d'un sociologue, dont la thèse a porté sur les modalités de solidarisation avec les migrants en situation irrégulière. Nous travaillons ensemble dans un observatoire national « santé mentale, vulnérabilités sociales et sociétés », qui a œuvré à alerter les professionnels et la puissance publique sur la nécessité d'appréhender la souffrance psychique des personnes migrantes. Notre proposition vise à problématiser comment la manière de caractériser les troubles mentaux, notamment des personnes migrantes, relèvent d'enjeux évidemment cliniques mais aussi sociaux et politiques.
L'évolution du militantisme et des formes de subjectivation politique a eu des incidences sur une lecture « psychologisante » de l'exclusion et de la discrimination. Le champ de la santé mentale en s'ouvrant aux problématiques de migration « cherche » des modalités d'adaptation pour que les réponses puissent s'adapter aux spécificités de ces publics, pour faire face à la crise des dispositifs censés les accueillir (comme les Permanence d'Accès Aux Soins). Nous assistons ainsi à l'émergence d'un consensus sur la nécessité de mieux prendre en charge le psychotraumatisme, qui a abouti à la création récente des Centres Régionaux de Psychotraumatisme. Ces lieux de consultations proposent une offre de soins aux personnes victimes de traumatisme, notamment de guerre ou liés à l'exil et à la migration. Nous analyserons alors les conditions de l'émergence de la santé mentale des personnes victimes de psychotraumatisme comme préoccupation publique, indexée à une lecture « médicale » de ce traumatisme.
Puis nous documenterons l'usage et les traductions des catégories en lien avec le traumatisme dans un corpus d'entretiens et de consultations dans le cadre du projet Remilas (http://icar.cnrs.fr/projet-remilas/), plus particulièrement sur un terrain où des médecins établissent des certificats médicaux.